Nous vivons maintenant la période la plus dangereuse de l'Histoire. Vladimir FEDOROVSKI

"We are living in the most dangerous period in history". Vladimir FEDOROVSKI

English translation below

Versione italiana Versione italiana 15 gennaio 2025 in LAB Politiche et culture

Vladimir FEDEROVSKI, diplomate et écrivain russe, est le fils d’un héros ukrainien de la seconde guerre mondiale. C’est en 1972 qu’il commence à travailler comme attaché à l’ambassade de l’Union Soviétique en Mauritanie où, arabisant, il assiste Léonid Brejnev comme interprète. En poursuivant sa carrière, c’est vers la France qu’il se tourne. Il est nommé attaché culturel à Paris en 1977 et passe un doctorat en histoire sur le rôle des cabinets dans l’histoire diplomatique française en 1985.A son retour à Moscou, il travaille au ministère des Affaires étrangères. C’est alors qu’il se lie d’amitié avec Alexandre Iakovlev, éminence grise de Gorbatchev et considéré comme l’instigateur de la perestroïka. Il sera nommé conseiller diplomatique et participera à la promotion de la perestroïka en France. Finalement lassé par l’incohérence de Gorbatchev, il décide de quitter la carrière diplomatique en 1990 pour participer à la création d'un des premiers partis démocratiques russes, le Mouvement des réformes démocratiques. S'opposant à la ligne dure du parti communiste et du KGB, il devient le porte-parole du mouvement des réformes démocratiques pendant la résistance au putsch de Moscou d'août 1991. Vladimir FEDOROVSKI se concentre depuis sur sa carrière d’écrivain. Ses ouvrages, écrits en français, deviennent des succès internationaux et sont traduits dans 28 pays. Il est l’écrivain russo-ukrainien le plus édité en France. Il est également régulièrement appelé à commenter la situation géopolitique internationale.

Interview conjointe du 20/12/2024 

par Jean-Claude MAIRAL, coprésident de I-Dialogos, et Pierrick HAMON, Délégué Général de I-Dialogos

avec Giuseppe GILIBERTI de la revue italienne LAB Politiche e culture, à Bologne (en italien)

I-Dialogos/ Lab Politiche e Culture : Vladimir Fédorovski, vous venez de publier un nouvel ouvrage « Staline-Poutine, un dialogue d’outre-tombe ». Vous notez que, avant les sanctions décidées par les Occidentaux, les russes étaient à plus de 80% favorables à l’Union Européenne, alors qu’aujourd’hui ce serait plutôt l’inverse, avec une incroyable remontée de la popularité de Staline. Comment expliquez-vous ce renversement ?  

Vladimir Fédorovski : On vit maintenant la période la plus dangereuse de l'histoire de l'Europe. En Russie, Staline est en effet devenu le personnage le plus populaire, plus que tous les autres dirigeants de la Russie historique. C'est un phénomène unique, c'est plutôt le phénomène historique. Toutes les lignes rouges sont dépassées.  Il y a un mélange entre la propagande et la politique réelle. J'utilise ainsi dans ce livre, un supposé dialogue entre Poutine et Staline pour expliquer la crise actuelle.

Jean-Claude Mairal : Est-ce qu'il n'y a pas eu une formidable occasion manquée, par les occidentaux, par les Américains mais aussi par la France et  par l'ensemble des pays de l'Est de l'Europe alors qu’étaient réunies les conditions pour bâtir, comme le disait le général De Gaulle, une Europe de l'Atlantique à l'Oural ? 

Vladimir Fédorovski : je suis à 100% d'accord avec vous. Il s’agissait d’une occasion absolument unique pour le monde, une occasion complètement manquée par les Diplomaties, notamment européennes. Les occidentaux ont estimé que ce que faisait Gorbatchev, c'était une preuve de faiblesse alors que c’était, au contraire, une preuve de force intellectuelle. Comme diplomate, proche du numéro deux au Kremlin, j’ai été mêlé de près à tout cela. Nous voulions participer à la construction d’un nouveau monde. Je tiens à vous raconter une anecdote plus personnelle. J'ai vu Mitterrand quelques jours avant sa mort pour une sorte de visite d'adieu. Il me dit « Vladimir encore un mot ». C'était le dernier à mon intention : « Gorbatchev   n'appartient pas au passé, il appartient à l'avenir ». Cette formule correspondait vraiment à la réalité. 

Après la guerre froide ; on aurait pu, soit construire un monde basé sur la force, soit privilégier l'équilibre des intérêts. C’est ce que comprenaient les gens sensés, et pas seulement en Europe. J'ai connu un grand diplomate américain, Secrétaire d’Etat adjoint des US. Il s'appelait George Kennan. C’est lui qui avait été à l'origine de la théorie du « containment » pendant toute la guerre froide.  Je l'ai rencontré alors qu’il avait plus de 100 ans, peu avant qu'il ne disparaisse.  Il m'a dit que la plus grande erreur occidentale depuis Jésus-Christ fut de ne pas avoir su saisir cette chance. La chute du mur avait été décidée 6 mois auparavant à Moscou. 

Le secrétaire d'État américain du moment James Baker prend l’engagement que l’OTAN ne bougerait pas d’un pouce.

Gorbatchev voulait aller vers la réunification de l'Allemagne. C'était en juin 1989. J’y étais et j'aurais pu vous raconter comment cela s'est passé. Il y avait quand même 500 000 soldats soviétiques en Allemagne. Il s’agissait d’un geste de bonne volonté.  Le secrétaire d'État américain du moment James Baker, au nom des États-Unis et en présence de mon ami, le grand Diplomate géorgien, Édouard Chevardnadzé, dernier ministre des Affaires étrangères de l’URSS, a pris l’engagement que l’OTAN ne bougerait pas d’un pouce.

aux éditions Balland

 Il n'y a pas eu de traités. Les américains en ont ensuite profité pour prétendre que cet engagement n’avait jamais existé, qu’il ne s’agissait que d’une parole verbale, que ce fut la victoire de l'Occident, ce qui était faux. 

Pourtant, autour de Gorbatchev des gens ont été des visionnaires avec une approche lucide de la réalité et une conception d’un socialisme démocratique à visage humain. Ils ont voulu construire un nouveau monde, sans guerre. A l’époque, Mikhaïl Gorbatchev faisait confiance aux occidentaux.  Il était naïf et c’est cette naïveté qui fait que sa popularité est tombée au plus bas dans le pays. Poutine lui reproche justement de ne pas avoir fait de traité. Comme témoin, je peux néanmoins vous confirmer cet engagement de James Baker. Toute la crise actuelle remonte à cette période.

 GiuseppeGiliberti: Vous avez dit que nous vivions dans une période beaucoup plus dangereuse que la guerre froide.  A quelles conditions l'Europe pourrait-elle sortir de cette impasse dans laquelle il n’y a plus de ligne rouge en Ukraine ?  Comment l'Union européenne pourrait-elle créer un nouvel ordre mondial grâce à une union plus étroite et à une offre de coopération économique avec la Russie ?  Est-il encore possible de créer un système de sécurité européenne, autonome par rapport aux États-Unis ? 

Vladimir Fédorovski : C’est une question très sérieuse.  Je n'ai pas de réponse définitive, mais je suis absolument persuadé que l'Europe et la Russie sont complémentaires. La coopération de l’Europe avec la Russie est essentielle. J'ai bien connu Chirac qui était un ami.  Il était convaincu que l’on devait s’inscrire, comme disait Fernand Braudel, l'historien français, dans un temps long, dans une histoire longue et que la culture russe est éminemment européenne.  Il suffit de se souvenir de Tolstoï ou de Diaghilev par exemple.  

Comme diplomate qui ait participé à la gestion de beaucoup de crises, je pense qu'il ne faut pas agir contre quelque chose ou contre quelqu'un, qu’il ne faut donc pas agir nécessairement contre les États-Unis. La question de la Sécurité de la Russie est néanmoins absolument essentielle.  C’est pourquoi, la situation est si grave. 

Les Russes pensent que l'Europe a vendu son âme et est devenue vassale des États-Unis. Ils pensent désormais que le continent de l'avenir, c'est l'Asie. Ils estiment que le futur est avec les BRICS. J’étais jusque là persuadé que la prospérité de l'Europe était liée à 3 facteurs : le gaz et le pétrole pas chers provenant essentiellement de Russie / le développement de la coopération avec la Chine / la diminution des dépenses militaires. Mais ces facteurs n'existent plus du fait de sanctions décidées par les Occidentaux. Des sanctions qui se sont d’ailleurs révélées totalement contreproductives pour les pays de l’Union et notamment pour l’Allemagne et la France. Cela a fourni l’occasion à la Russie de réorienter et réorganiser ses ressources y compris vers la Chine et l’Inde, et pas seulement. 

Je dois avouer que, paradoxalement peut-être, les Russes continuent à adorer la France et l'Italie. Je voyage beaucoup en Europe. On prétend que la France et l’Italie seraient devenues russophobes, ce qui n’est pas vrai.  La France, où je vis, est un des pays les plus russophiles. 

Mais on y trouve aussi un grand nombre de gens plus proches des néoconservateurs américains et qui ont probablement des comptes à régler avec la Russie.

Une Russie morcellée en 37 Etats ?

Ces derniers cherchent à affaiblir la Russie en cherchant à provoquer une scission du pays en plusieurs états, conformément à la théorie de Paul Wolfowitz, le Secrétaire d'état adjoint à la défense du temps de Bush-fils qui avait délibérément menti à propos de l'élargissement de l’OTAN. L'Ukraine devait, pour lui, servir de fer de lance pour affaiblir la Russie. Lors de la chute de l'Union soviétique, un ancien président polonais m’a même présenté les cartes des 37 états qui pourraient remplacer la Russie. Imaginez le chaos qui en résulterait en Russie qui a plus de 100 nationalités sur son territoire, et de différentes religions. Les Russes ne peuvent évidemment pas accepter de telles menaces de scission.  

Jean-Claude Mairal : Poutine n’avait il pas déjà mis en garde au sujet de l’OTAN ? 

Vladimir Fédorovski : En 2008, à l’occasion de la Rencontre de Budapest, Poutine avait en effet  clairement prévenu que l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN constituerait un « casus belli », qu’il n’était pas question de risquer de porter atteinte à la sécurité du pays en laissant installer des missiles à 5 minutes de portée de Moscou. Cela équivaudrait à l’installation de fusées à la frontière mexicaine face au US.  

Les Américains avaient, en 1962, exigé et obtenu de Khroutchev, pour les mêmes raisons et sous la menace d’une guerre mondiale, le retrait des fusées soviétiques de Cuba. C’est cette même raison sécuritaire qui conduit Israël à faire des guerres et qui a engendré celle en Ukraine. 

Au nom du libéralisme et avec de brutales et lourdes privatisations, comme au nom de la Démocratie, les Etats Unis avaient réussi à convaincre Eltsine de permettre à 3% de la population de se partager 60% de la richesse du pays. La moitié de la population est alors rapidement tombée sous le seuil de pauvreté. Plus de 120 milliards de dollars ont ainsi pu quitter la Russie pour se réfugier illégalement dans les banques londoniennes, et cela, avec la complicité des banques occidentales. 

Ces gens-là parlent des valeurs mais, en réalité, ils confondent voleurs et valeurs.  Ces gens devraient relire Tolstoï, ou plutôt lire Tolstoï. Ils ont volé la Russie d'une manière absolument extraordinaire. Ce fut le plus grand cambriolage du XXème siècle. 

Les affirmations de Francis Fukuyama sur la fin de l’Histoire se sont révélées complètement fausses. On assiste aujourd’hui à l’émergence d'un monde réellement multipolaire.  On aurait pourtant pu rechercher des intérêts communs et un équilibre des intérêts, et agir sans guerres et choisir la paix.  Vous savez que j’ai souvent été critique à l’égard de Poutine.  

J'ai une double origine : russe par ma mère et ukrainienne par mon père qui était un grand héros de la guerre contre les nazis. Je vis cette guerre comme une tragédie personnelle. 

Les Russes progressent sur tous les fronts, ce qui est très dangereux et de plus en plus tragique pour les Ukrainiens.  Les pertes ont été considérables et le pays ne dispose pas des ressources humaines nécessaires. Les chiffres sont effrayants. Il est absolument nécessaire de mener les négociations maintenant pour éviter la disparition de toute une génération.   

Pierrick Hamon : Dans les médias occidentaux, il est tous les jours question de la « dictature » de Poutine. Lui-même a évoqué dans sa récente conférence de presse, des difficultés économiques. L’arrivée, sur le front, de militaires nord-coréens, n’est-il quand même pas le signe de difficultés militaires aussi pour les russes ? 

Vladimir Fédorovski : Les Russes n'en ont pas besoin. Ils ont voulu montrer que, de leur coté aussi, en faisant appel à la Corée du Nord, et éventuellement à la Chine et à d’autres, une accentuation du conflit pourrait avoir des conséquences beaucoup plus larges et mondiales. Dans cette guerre médiatique chacun utilise les symboles. Personnellement je n’aurais pas fait appel aux soldats coréens. C'est dangereux. C’est une réponse aux menaces d’internationalisation du conflit et à la présence des Anglais, des Français et des Américains en Ukraine.  Les missiles de longue portée utilisés par les forces ukrainiennes ne peuvent pas être utilisés sans être guidés par les spécialistes occidentaux. 

Évidemment les Russes ont leurs propres difficultés économiques mais les sanctions ont aussi conduit à une flambée d'investissements. Malgré les sanctions occidentales et l’inflation, l’économie russe résiste, avec une  croissance de 4% cette année, alors qu’elle est nulle en Allemagne et de 1% en France et en Italie. 

C’est dans ce contexte que la Russie a pu constituer une armée d’un million et demi de soldats.   A ce sujet les fake news véhiculées dans les médias occidentaux sont innombrables. Rappelez-vous quand ils prétendaient que les russes n’avaient pas de fusées, que Poutine allait mourir d’un cancer, etc. S’ils peuvent payer les volontaires c’est parce qu'ils ont les réserves sur plusieurs années. Le Ministre français Le Maire avait même annoncé que la Russie se retrouverait « à genoux en quelques semaines ». En réalité, les sanctions furent un cadeau pour l'économie russe qui a pu ainsi rattraper, en 3 ans, 10 années de retard. 

Le complexe militaro-industriel produit aujourd'hui 3 à 4 fois plus d’obus que toute l’Europe. Les nouvelles fusées balistiques Oreshnik de moyenne portée changent complètement la donne. 

Les interdictions en Ukraine et dans certains pays concernant les auteurs russes a renforcé considérablement la popularité de Poutine.  Selon les chiffres mêmes de la CIA, sa popularité est montée à 78% voire 80%. La véritable opposition en Russie est composée de gens beaucoup plus radicaux, qui reprochent à Poutine de ne pas réagir assez fort, ceux que je présente dans mon dernier livre comme le retour de Staline. Les pro occidentaux, qui étaient près de 80% avant les sanctions, ne représentent désormais qu’une petite minorité.  

J'ai géré beaucoup de crises entres les Russes et les Américains. Ils  se rencontraient régulièrement à Vienne et s’accordaient pour ne pas tuer les dirigeants et hauts gradés respectifs. Les Ukrainiens viennent de revendiquer l’assassinat récent d’un général en affirmant « vouloir faire peur », ce qui a eu l’effet inverse au sein d’une population ulcérée et indignée. C’est un très grand danger. Les nouveaux missiles russes pourraient être beaucoup plus dévastateurs sur les personnes, sans parler d’une supériorité militaire qui, en Europe, est de 10 pour 1. 

Une conférencede presse qui est aussi une manière de diplomatie orale publique

Giuseppe Giliberti : Vous avez dit qu’il y a eu une sous-estimation des aspects irrationnels, que les origines de la crise résultent d’un manque d'initiative diplomatique. Mais il y a aussi une violence du langage des chefs d'État et aussi des diplomates. N’est ce pas un problème en soi ? Pendant la crise de Cuba il n’y avait pas cette violence de langage aussi offensante.   

Vladimir Fédorovski : Une nouvelle génération est arrivée au pouvoir dans de nombreux pays. Une bonne partie n'a pas peur de la guerre qu’elle n’a pas connue. Ils sont pleins de mépris pour les Russes dont ils ignorent les mentalités. Poutine est plutôt dans la retenue, ce que lui reproche d’ailleurs l’opposition stalinienne. La diplomatie n’existe plus. Nous vivons le moment le plus dangereux de l'histoire de l'humanité, et si on continue comme ça on va tout droit vers l'apocalypse.   

Si vous avez regardé la dernière conférence de presse de Poutine, sans aucune note, vous aurez relevé qu’il a complètement changé, et la situation actuelle tourne à son profit. Cette conférence est aussi une manière de diplomatie orale publique, une négociation à haute voix. Poutine y a précisé qu’il était prêt à négocier, prêt à un compromis sur la base des accords d’Istanbul qui avaient été finalement bloqués par les anglais et les américains et qui auraient évité tant de pertes humaines considérables, un mois seulement après le début du conflit. 

Créer une zone démilitarisée en Ukraine ne réglerait rien

Giuseppe Giliberti : En Italie les médias sont convaincus que la présidence de Trump rendra possible un accord très rapide entre la Russie et l'Ukraine.  Quelle est votre opinion ? 

Vladimir Fédorovski : Les contacts avec Trump ont été rétablis. On verra. Le Washington Post a même déjà fait état d’un récent échange téléphonique entre Trump et Poutine. Les européens ont évoqué la possibilité d’installer des soldats de l'OTAN dans une zone démilitarisée. Solution préconisée par les néoconservateurs occidentaux. 

C’est ce que les Russes et Poutine ne pourraient évidement pas accepter au risque de reporter le conflit à plus tard, après un temps de réarmement. Ce serait une solution à la coréenne avec un réarmement de l’Ukraine par les forces de l’OTAN. C’est évidement inacceptable. Ce que veulent les Russes, c’est une garantie de Sécurité. C’est le point central depuis le début. 

Le futur vice-président Vance va certainement jouer un rôle majeur. Il préparerait un plan de stabilisation négocié en sourdine, non à la coréenne mais à l’autrichienne, avec une reconstruction de l’Ukraine qui pourrait alors faire éventuellement partie de l’Union européenne, chose à laquelle les russes ne se sont jamais opposés contrairement aux affirmations répétées dans certains médias. Le casus belli, et depuis le début, c’est l’OTAN. 

La déclaration du président Hollande et de la chancelière Merkel prétendant avoir accepté les accords de Minsk, uniquement pour donner le temps à l’Ukraine de se réarmer, ont totalement décrédibilisé les Diplomaties de ces deux pays. 

Pierrick Hamon : Vous évoquiez une surprenante russophilie des français et des italiens, une russophilie  qui ne semble pas avoir touché les médias. Dans son livre « Les autres ne pensent pas comme nous », l’ancien conseiller diplomatique de Jacques Chirac, Maurice Gourdault-Montagne, s’étonnait même de cette véritable d'hystérie antirusse.  Comment expliquer les revirements du président Macron ? 

Vladimir Fédorovski : Si je suis un spécialiste de Poutine, je ne suis pas spécialiste de la psychologie de Macron. Concernant le rôle des médias, certains vont jusqu’à imaginer que de taupes fourniraient des éléments de langage critique pour augmenter la popularité de Poutine ? 

Ainsi quand on interdit la publication des grands auteurs classique russes. En Italie, on a empêché la grande cantatrice russe Anna Netrebko de se produire… Tout cela renforce la popularité de Poutine. Les mots diplomatie et géopolitique ne font, semble t-il, pas partie de la culture d’une partie de cette nouvelle génération de journalistes. J’ai connu des journalistes qui étaient à l’époque très anti soviétiques mais qui étaient plus calés sur la connaissance des choses. Il y a un vrai problème de formation et même d’éducation. 

J'étais l'interprète en langue arabe de Brejnev. Je connais donc bien la région

Jean-Claude Mairal : Au sujet de la Syrie, on a vu les rebelles arriver à Damas en peu de temps, et le régime s'effondrer alors qu’il était soutenu par la Russie. Quelle est votre opinion sur cette situation ? En tant que diplomate avez-vous été surpris par cette effondrement aussi rapide ? 

Vladimir Fédorovski : Pour la rapidité : Oui. Pour la situation, non.  J'ai oublié de vous dire que, dans ma longue vie diplomatique, j'étais l’interprète en langue arabe de Brejnev. J’ai donc bien connu les dirigeants de la région de l'époque.  On savait qu’Assad était affaibli. Il y avait 2 problèmes. Le premier c’est qu’il s’appuyait essentiellement sur la vielle garde autrefois formée par son père, et dont il a du évincer certains qui pouvaient lui porter tort.  Cela a fragilisé son armée.  D’autres devenus vieux sont partis à la retraite. Le deuxième problème, c’est que les Iraniens, concentrés sur d'autres priorités, notamment le Hezbollah, n'étaient pas capables d’intervenir. Les Russes l’avaient compris et prévenu Assad.  Poutine s’est refusé à envoyer des troupes russes pour ne pas risquer un nouvel enlisement comme en Afghanistan, ce que les américains auraient voulu pour les écarter de la Syrie. 

Le FSB avait indiqué à Poutine que face à 15 000 rebelles, Assad ne pouvait tenir, et qu’il ne serait pas opportun d’ouvrir un deuxième front après celui de l’Ukraine. Poutine a donc négocié, à travers le processus d’Astana, avec la Turquie, l’Iran et plusieurs pays arabes, le retrait des troupes d’Assad en partie vers la Libye et l’Algérie. Il a également eu des contacts avec Israël. Les nouvelles autorités auraient indiqué leur souhait que les bases russes soient maintenues, comme les américaines. A voir… 

Les BRICS ne sont pas créés contre  l’Occident

Giuseppe Giliberti : En ce qui concerne les rapports entre la Russie et les BRICS, s’agit il d’une réalité stable pour le futur ?

Vladimir Fédorovski : Je pense que c'est en effet le sens de l’évolution du monde et la Russie s’y est engagée. Le monde ne peut plus marcher sous l’hégémonie totale des États-Unis. Il faut un monde équilibré.  

Mais où sont les Européens dans les négociations ? Leur absence est totale. Les Américains décident et les Européens exécutent. C’est ce que voient les autres Etats de la planète. Ils ne veulent donc pas se retrouver dans la même situation que celle de l’Union européenne. 

Et puis, il n'y a pas, ou plus, de désir d'Europe. C'est une chose qui m’est pénible de rappeler, moi qui me considère comme un trait d'union entre l'Europe et la Russie.  L'Asie est le continent de l'avenir. Les BRICS ne sont pas créés contre l’Europe ou l’Occident, mais pour prendre part à la marche d’un monde devenu réellement multipolaire. 

En Europe, il va y avoir, avec les prochaines élections, un changement radical de la situation notamment en Allemagne comme aux Etats Unis.  Ce sera une autre Allemagne. Possible que ces prochaines élections amènent au pouvoir une équipe plus anti Poutine encore. 

Mais j’ose espérer que la diplomatie retrouvera enfin la place qu’elle n’aurait jamais du perdre.

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We are now living in the most dangerous period in history. Vladimir FEDOROVSKI


Vladimir FEDOROVSKI, a Russian diplomat and writer, is the son of a Ukrainian hero of World War II. He began working as an attaché at the Soviet Embassy in Mauritania in 1972, where, as an Arabist, he assisted Leonid Brezhnev as an interpreter. As he continued his career, he turned towards France. He was appointed cultural attaché in Paris in 1977 and completed a doctorate in history on the role of cabinets in French diplomatic history in 1985. Upon returning to Moscow, he worked at the Ministry of Foreign Affairs. It was during this time that he befriended Alexander Yakovlev, a key figure in Gorbachev's administration and considered the instigator of perestroika. He was appointed diplomatic advisor and participated in promoting perestroika in France. Eventually weary of Gorbachev's inconsistencies, he decided to leave the diplomatic career in 1990 to help create one of the first Russian democratic parties, the Democratic Reform Movement. Opposing the hardline stance of the Communist Party and the KGB, he became the spokesperson for the democratic reform movement during the resistance to the Moscow coup in August 1991. Since then, Vladimir FEDOROVSKI has focused on his writing career. His works, written in French, have become international successes and are translated into 28 countries. He is the most published Russo-Ukrainian writer in France and is regularly called upon to comment on the international geopolitical situation.


by Jean-Claude MAIRAL, co-president of I-Dialogos, and Pierrick HAMON, General Delegate, 

with Giuseppe Giliberti from the Italian magazine LAB Politiche e Culture, in Bologna


I-Dialogos/Lab Politiche e CultureVladimir Fedorovski, you have just published a new book "Stalin-Putin, a dialogue from beyond the grave." You note that before the sanctions imposed by the West, over 80% of Russians were in favor of the European Union, whereas today it would be quite the opposite, with an incredible rise in Stalin's popularity. How do you explain this reversal?

Vladimir Fedorovski: We are now living in the most dangerous period in European history. In Russia, Stalin has indeed become the most popular figure, more than all other leaders in Russian history. This is a unique phenomenon; it is rather a historical phenomenon. All red lines have been crossed. There is a mix between propaganda and real politics. In this book, I use a supposed dialogue between Putin and Stalin to explain the current crisis.

Jean-Claude MairalWas there not a tremendous missed opportunity by the West, by the Americans, but also by France and all the Eastern European countries when the conditions were ripe to build, as General De Gaulle said, a Europe from the Atlantic to the Urals?

Vladimir Fedorovski: I completely agree with you. It was an absolutely unique opportunity for the world, a completely missed opportunity by diplomacy, especially European diplomacy. The Westerners believed that what Gorbachev was doing was a sign of weakness, whereas it was, on the contrary, a sign of intellectual strength. As a diplomat close to the number two in the Kremlin, I was closely involved in all of this. We wanted to participate in the construction of a new world. I want to share a more personal anecdote. I saw Président François Mitterrand a few days before his death for a sort of farewell visit. He said to me, "Vladimir, one more word." That was his last word to me: "Gorbachev does not belong to the past; he belongs to the future." This statement truly reflected reality.

After the Cold War, we could have either built a world based on strength or prioritized the balance of interests. This is what sensible people understood, not just in Europe. I knew a great American diplomat, the Deputy Secretary of State. His name was George Kennan. He was the one who originated the theory of "containment" during the entire Cold War. I met him when he was over 100 years old, shortly before he passed away. He told me that the greatest Western mistake since Jesus Christ was not seizing this opportunity. The fall of the wall had been decided six months earlier in Moscow. Gorbachev wanted to move towards the reunification of Germany. It was in June 1989. I was there and I could tell you how it happened. There were still 500,000 Soviet soldiers in Germany. It was a gesture of goodwill. The then American Secretary of State, James Baker, on behalf of the United States and in the presence of my friend, the great Georgian diplomat, Eduard Shevardnadze, the last Foreign Minister of the USSR, committed that NATO would not move an inch. 

There were no treaties. The Americans later took advantage of this to claim that this commitment had never existed, that it was just a verbal promise, that it was the victory of the West, which was false. Yet, around Gorbachev, there were visionaries with a lucid approach to reality and a conception of democratic socialism with a human face. They wanted to build a new world, without war. At the time, Mikhail Gorbachev trusted the Westerners. He was naive, and this naivety is what caused his popularity to plummet in the country. Putin reproaches him precisely for not having made a treaty. As a witness, I can nevertheless confirm this commitment from James Baker. The entire current crisis dates back to that period.

Giuseppe GilibertiYou said that we are living in a much more dangerous period than the Cold War. Under what conditions could Europe emerge from this deadlock where there are no longer any red lines in Ukraine? How could the European Union create a new world order through closer union and an economic cooperation offer with Russia? Is it still possible to create a European security system that is autonomous from the United States?

Vladimir Fedorovski: This is a very serious question. I do not have a definitive answer, but I am absolutely convinced that Europe and Russia are complementary. The cooperation of Europe with Russia is essential. I knew Chirac well, who was a friend. He was convinced that we should, as Fernand Braudel, the French historian, said, be part of a long time, in a long history, and that Russian culture is eminently European. One only needs to remember Tolstoy or Diaghilev, for example. As a diplomat who participated in managing many crises, I believe that we should not act against something or someone, and thus not necessarily act against the United States. However, the question of Russia's security is absolutely essential. This is why the situation is so serious. 

Russians believe that Europe has sold its soul and has become a vassal of the United States. They now think that the continent of the future is Asia. They believe that the future lies with the BRICS. 

Until now, I was convinced that Europe's prosperity was linked to three factors: cheap gas and oil primarily from Russia, the development of cooperation with China, and the reduction of military spending. But these factors no longer exist due to sanctions imposed by the West. Sanctions that have proven to be totally counterproductive for the EU countries, especially for Germany and France. This has provided Russia with the opportunity to redirect and reorganize its resources, including towards China and India, and not only. I must admit that, paradoxically perhaps, Russians continue to adore France and Italy. I travel a lot in Europe. It is claimed that France and Italy have become Russophobic, which is not true. France, where I live, is one of the most Russophile countries. But there are also many people closer to American neoconservatives who probably have scores to settle with Russia. 

These individuals seek to weaken Russia by trying to provoke a split of the country into several states, in accordance with the theory of Paul Wolfowitz, the Deputy Secretary of Defense during Bush Jr.'s time, who had deliberately lied about NATO's enlargement. Ukraine was to serve as a spearhead to weaken Russia. During the fall of the Soviet Union, a former Polish president even showed me maps of the 37 states that could replace Russia. Imagine the chaos that would result in Russia, which has over 100 nationalities on its territory and different religions. Russians obviously cannot accept such threats of division.

Jean-Claude Mairal: Didn't Putin already warn about NATO? 

Vladimir Fedorovsky: In 2008, during the Budapest Summit, Putin clearly warned that Ukraine's entry into NATO would constitute a "casus belli," and that there was no way he would risk the country’s security by allowing missiles to be installed just five minutes from Moscow. This would be equivalent to installing missiles at the Mexican border facing the United States. In 1962, the Americans demanded, and obtained from Khrushchev, the withdrawal of Soviet missiles from Cuba for the same reasons, under the threat of a world war. It is this very security concern that leads Israel to go to war, and which also led to the war in Ukraine. 

In the name of liberalism and with brutal and heavy privatizations, as well as in the name of Democracy, the United States managed to convince Yeltsin to allow 3% of the population to divide up 60% of the country's wealth. Half of the population quickly fell below the poverty line. Over 120 billion dollars were thus able to leave Russia and illegally seek refuge in London banks, with the complicity of Western banks. These people speak of values, but in reality, they confuse thieves with values. These people should read Tolstoy, or rather, they should read Tolstoy. They stole Russia in an absolutely extraordinary manner. It was the greatest robbery of the 20th century. 

Francis Fukuyama’s claims about the "end of history" have proven to be completely false. We are now witnessing the emergence of a truly multipolar world. Yet, we could have sought common interests and a balance of interests, acting without war and choosing peace. You know that I have often been critical of Putin. I have a dual heritage: Russian through my mother and Ukrainian through my father, who was a great hero of the war against the Nazis. I live this war as a personal tragedy. The Russians are making progress on all fronts, which is very dangerous and increasingly tragic for the Ukrainians. The losses have been considerable, and the country does not have the necessary human resources. The numbers are terrifying. It is absolutely necessary to start negotiations now to avoid the disappearance of an entire generation. 

Pierrick Hamon: In the Western media, every day we hear about Putin's "dictatorship." He himself mentioned economic difficulties in his recent press conference. The arrival of North Korean soldiers on the front lines—doesn’t this indicate military difficulties for the Russians as well? 

Vladimir Fedorovsky: The Russians don’t need them. They wanted to show that, on their side as well, by calling on North Korea, and possibly China and others, an escalation of the conflict could have much wider, global consequences. In this media war, everyone uses symbols. Personally, I wouldn’t have called upon Korean soldiers. It’s dangerous. It’s a response to the threats of internationalizing the conflict and to the presence of the British, French, and Americans in Ukraine. The long-range missiles used by Ukrainian forces cannot be used without being guided by Western specialists. 

Of course, the Russians have their own economic difficulties, but the sanctions have also led to a surge in investments. Despite Western sanctions and inflation, the Russian economy is holding up, with a 4% growth this year, while growth is stagnant in Germany and just 1% in France and Italy. It is in this context that Russia has managed to form an army of one and a half million soldiers. 

On this topic, the fake news spread by Western media are countless. Remember when they claimed that the Russians didn’t have rockets, that Putin was going to die of cancer, etc. If they can pay volunteers, it’s because they have reserves for several years. French Minister Le Maire even announced that Russia would be "on its knees in a few weeks." In reality, the sanctions were a gift for the Russian economy, which has been able to make up, in three years, for 10 years of lag. 

The military-industrial complex today produces 3 to 4 times more shells than all of Europe. The new Oreshnik medium-range ballistic missiles completely change the game. The bans on Russian authors in Ukraine and in some other countries have greatly increased Putin's popularity. According to CIA data, his popularity has risen to 78%, even 80%. The real opposition in Russia is made up of much more radical people who criticize Putin for not reacting strongly enough, those I describe in my latest book as the return of Stalin. The pro-Westerners, who were nearly 80% before the sanctions, now represent only a small minority. I have managed many crises between the Russians and the Americans. They used to meet regularly in Vienna and agreed not to kill each other's leaders and senior officers. The Ukrainians recently claimed responsibility for the assassination of a general, stating they "wanted to create fear," which had the opposite effect on a population that was outraged and disgusted. This is a very great danger. The new Russian missiles could be much more devastating to people, not to mention a military superiority that, in Europe, is 10 to 1. 

Giuseppe Giliberti: You mentioned that there has been an underestimation of the irrational aspects, and that the origins of the crisis stem from a lack of diplomatic initiative. But there is also the violence of the language used by heads of state and diplomats. Isn't that a problem in itself? During the Cuban crisis, there was no such offensive and violent language. 

Vladimir Fedorovsky: A new generation has come to power in many countries. A large part of this generation is not afraid of war because they have not experienced it. They are full of contempt for the Russians, whose mentalities they do not understand. Putin, on the other hand, is rather restrained, which is precisely what the Stalinist opposition criticizes him for. Diplomacy no longer exists. We are living in the most dangerous moment in human history, and if we continue like this, we are heading straight for the apocalypse. 

If you watched Putin's most recent press conference, without any notes, you would have noticed that he has completely changed, and the current situation is turning to his advantage. This conference is also a form of public oral diplomacy, a negotiation out loud. Putin made it clear that he is ready to negotiate, ready to compromise based on the Istanbul agreements, which were ultimately blocked by the British and the Americans and would have prevented so many significant human losses, just one month after the conflict began. 

Giuseppe Giliberti: In Italy, the media are convinced that Trump's presidency will make a very quick agreement between Russia and Ukraine possible. What is your opinion? 

Vladimir Fedorovsky: Contacts with Trump have been re-established. We will see. The Washington Post recently reported on a recent phone call between Trump and Putin. Europeans have discussed the possibility of deploying NATO troops in a demilitarized zone— a solution advocated by Western neoconservatives. This is something that the Russians and Putin could obviously not accept, as it would risk prolonging the conflict after a period of rearmament. It would be a "Korean solution," with Ukraine being rearmed by NATO forces. This is, of course, unacceptable. What the Russians want is a guarantee of security. That has been the central point from the beginning. Future Vice President Vance will certainly play a major role. He is preparing a negotiated stabilization plan, quietly, not the Korean way but the Austrian way, with the reconstruction of Ukraine, which could then potentially become part of the European Union—something the Russians have never opposed, contrary to repeated claims in certain media. The real "casus belli" since the beginning has been NATO. 

The statement by President Hollande and Chancellor Merkel, claiming to have accepted the Minsk agreements only to give Ukraine time to rearm, has completely discredited the diplomacy of these two countries. 

Pierrick Hamon: You mentioned the surprising Russophilia of the French and Italians, a Russophilia that doesn't seem to have touched the media. In his book "Les autres ne pensent pas comme nous", former diplomatic advisor to Jacques Chirac, Maurice Gourdault-Montagne, was even surprised by this true anti-Russian hysteria. How do you explain President Macron's about-turn? 

Vladimir Fedorovsky: While I am a specialist on Putin, I am not a specialist in Macron's psychology. Regarding the role of the media, some even go so far as to imagine that moles might be providing critical talking points to increase Putin's popularity? Thus, when the publication of major Russian classic authors is banned. In Italy, the great Russian soprano Anna Netrebko was prevented from performing… All of this only boosts Putin's popularity. The words "diplomacy" and "geopolitics" do not seem to be part of the culture of some of this new generation of journalists. I knew journalists who were very anti-Soviet at the time but were much more knowledgeable about things. There is a real problem with training and even education. 

Jean-Claude Mairal: Regarding Syria, we saw the rebels reach Damascus in a short time, and the regime collapse despite being supported by Russia. What is your opinion on this situation? As a diplomat, were you surprised by such a rapid collapse? 

Vladimir Fedorovsky: Regarding the speed: Yes. As for the situation: No. I forgot to tell you that, during my long diplomatic career, I was Brezhnev's Arabic interpreter. So, I knew the leaders of the region at the time very well. We knew that Assad was weakened. There were two main problems.


The first is that he relied mainly on the old guard, which was trained by his father, and from which he had to remove some members who could harm him. This weakened his army. Others, who had grown old, had retired.


The second problem was that the Iranians, focused on other priorities, notably Hezbollah, were unable to intervene. The Russians understood this and warned Assad. Putin refused to send Russian troops to avoid another quagmire like Afghanistan, which the Americans would have wanted in order to keep them out of Syria. 

The FSB had informed Putin that, faced with 15,000 rebels, Assad could not hold out, and it would not be prudent to open a second front after Ukraine. Putin then negotiated, through the Astana process, with Turkey, Iran, and several Arab countries, the withdrawal of Assad's troops partly to Libya and Algeria. He also had contacts with Israel. The new authorities reportedly expressed their wish for Russian bases to be maintained, just like the American ones. We'll see... 

Giuseppe Giliberti: Regarding relations between Russia and the BRICS, is this a stable reality for the future? 

Vladimir Fedorovsky: I think this is indeed the direction the world is moving in, and Russia has committed to it. The world can no longer function under the total hegemony of the United States. We need a balanced world. But where are the Europeans in the negotiations? Their absence is total. The Americans decide, and the Europeans execute. This is what other countries on the planet see. They don’t want to end up in the same situation as the European Union. 

And then, there is no longer, or no more, desire for Europe. This is something I find painful to remind you of, as I consider myself a bridge between Europe and Russia. Asia is the continent of the future. The BRICS are not created against Europe or the West, but to take part in the march toward a truly multipolar world. In Europe, with the upcoming elections, there will be a radical change in the situation, particularly in Germany and the United States. It will be a different Germany. It is possible that these upcoming elections will bring to power an even more anti-Putin team. 

But I dare hope that diplomacy will finally regain the place it should never have lost.

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